Un curieux voilier jette l’ancre à Kaora

Les plaisanciers prenant du bon temps au large de la capitale pryanne se réveillèrent de leur sieste quotidienne aux côtés d’un voilier venant de jeter l’ancre. Il s’agissait d’une sorte de frégate de sixième rang comme l’on en faisait dans l’ancien temps, au grand mât élancé et à la coque bardée de vingt canons. Navire très rapide dans sa catégorie, il n’était guère utilisé que pour les arrières gardes d’escadres, la poursuite de petits navires pirates ou les expéditions civiles. L’accoutrement de l’équipage et l’enseigne flottant au vent permirent de reconnaître aisément la nature avaroise du vaisseau. Bientôt, un petit attroupement de badauds en t-shirts et cocktails à la main se forma sur une plage proche, observant les marins s’afférer comme on le ferait devant une reconstitution historique.

A son bord, le bateau abritait un certain Gaspard de Fonleau, commis dépêché par les autorités impériales pour une mission diplomatique. Il ne s’agissait pas d’une première tentative. En 2007, le Traité de Kaora avait instauré une reconnaissance mutuelle entre Prya et Avaricum. Et en 2007 puis en 2009, le Traité de La Palice et le Pacte de famille avaient amorcé les relations avaro-fantispaises. Qu’en restait-il aujourd’hui ? Difficile à dire tant les deux états avaient pris des chemins différents. Tout au plus s’ignoraient-ils poliment l’un et l’autre, et ce malgré leur proximité géographique. Pourtant, les guildes avaroises de tisseranderies et de vignobles se doutaient de l’existence d’un marché pryan pour les costumes à froufrous de fêtes coquines et les bacchanales arrosées des meilleures crus castelmaurois. Ces corps d’artisans influents pétitionnèrent le palais et la suite ne tarda pas.

- " Voilà sans dovte levr mareſchav….hvm, police… " s’exclama Gaspard en voyant une vedette à gyrophares s’approcher " Je me charge de levr faire la converſation & de preſsenter nos docvments. "

Une échelle de lin fut alors descendue à l’intention des officiers abordant la frégate.

La vue de l’engin volant effraya quelques membres de l’équipage qui détalèrent dans la cale du vaisseau. Mais la plupart, ayant été sélectionnés pour leur bonne connaissance du monde moderne, ne bronchèrent pas. Ils restèrent tout de même stupéfaits devant l’arrivée haute en couleur du ministre pryan, descendant sur le pont par une corde d’hélicoptère. Sous l’effet des hélices, plusieurs individus virent d’ailleurs leur perruque s’envoler et s’écraser dans la face de leur voisin ! Naturellement, l’on ordonna au navire de faire demi-tour.

- " Salutations, Excellence. " s’exclama Gaspard dans une révérence "  Je suis le baron de Fonleau, envoyé par Sa Majesté pour rétablir les liens diplomatiques entre nos deux états. Tout d’abord, le gouvernement de votre république considère t-il le Traité de Kaora, par lequel nous nous étions mutuellement reconnus, comme toujours valide ? En outre, les bâtiments de notre ambassade sont-ils toujours debout et utilisables ? "

Spoiler:

Marco Conti : Bonjour monseigneur : le traité n'a pas été jugé caduc et est donc toujours d'actualité. Pour les bâtiments, je vais devoir vérifier cela, mais je vous prie de vous amarrer au quai !

Ils accostèrent dans le port, immédiatement submergés par des touristes et badauds. Le capitaine eut la bonne idée de les laisser visiter le navire en échange d’un simple pourliche optionnel. Les pryans purent s’émerveiller à l’intérieur de cette sorte de musée flottant qui ne tarderait sans doute pas à bénéficier d’un article dans la presse locale.

- " Merci de votre accueil, Excellence, c’est un plaisir de mettre le pied en Prya. Nous n’allons pas vous retenir plus longtemps et prendrons la direction du centre-ville en attendant que la situation de notre ambassade soit clarifiée. Un palace nous proposera certainement le gîte et le couvert pour quelques jours. L’hôtellerie pryanne est de renommée mondiale ! "

Gaspard et ses auxiliaires montèrent dans une berline chargée de grosses malles qui s’engagea dans une avenue de Kaora.

Marco Conti : Vous pourrez aussi aller parler au Président ou à un Ministre, au revoir !
Il remonta dans l'hélicoptère et partit vers le point de décollage.